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Monday, August 07, 2006

I’ve been waiting for a guide to come and take me by the hand Could These sensations make me feel the pleasures of a normal man New sensations bear the innocence leave them for another day I’ve go the spirit, lose the feeling take the shock away It’s getting faster, moving faster now, it’s getting out of hand On the tenth floor, down the backstairs into no-man’s land Lights are flashing, cars are crashing, getting frequent now I’ve got the spirit, lose the feeling, let it out somehow What means to you, what means to me, and we will meet again I’m watching you, I watch it all I take no pity from friends Who is right and who can tell, and who gives a damn right now Until the spirit, new sensation takes hold - then you know I’ve got the spirit, but lose the feeling Feeling
Joy Division
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De 25 à 30, encore consommé quelques gisements de femelles esseulées, entamé ici où là de pauvres danses avec des pas d’ange piégé. Coiffé plus que jamais d’un air fantôme, je suintais l’inassouvissement par tous les pores et l’idée de déchéance semblait idyllique au regard de mes activités faisandées. Une pulsation luxuriante de mépris prospérait autour de moi formant comme un champ de protection négative. A cause de tout le mal fait à mon enfance je ne pouvais plus fouler les quartiers liés à mon passé sans être saisi d’un vertige à la carnation d’ébène, comme si je n’avais rien semé de durable, de vivant. Je souhaitais les jours de grand courage reprendre le courant de ma vie là où il ne faisait plus son lit, là où farouche il aurait repris ses droits liquides, là où le monde aurait regorgé de signes absolus devant mes yeux ébahis. Le vouloir désaccordé, mon niveau d’acceptation du donné se réduisait comme peau de chagrin. Barbouiller ma vie d’espoirs flambants neufs, voilà ce que j’aurais voulu. Mais je ne disposais pas des ressources nécessaires pour porter ce vœu.


"Une société, une fois formée, tend à se maintenir , en vertu de quoi toutes les
énergies individuelles seront sur tous les domaines - économique, politique, juridique, moral - étroitement subordonnées à l’utilité commune. Malheur aux énergies qui ne se plient pas à cette discipline. La société les brise, ou les élimine sans hâte comme sans pitié. Elle apporte dans cette exécution le mépris le plus absolu de l’individu. Elle agit comme un instinct aveugle, irrésistible, et implacable. "
Georges Palante

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Un jeune homme bien sous tous rapports m’avait dit (il suintait l’arrogance des gens qui pavoisent par boursouflure égotique) au sortir du bar l’arlequin que l’on devait transiger avec les inconvénients. Lui avait été plaqué par sa femme qui avait embarqué les gosses pour refaire sa vie avec son propre père. Il prétendait avoir également récolté un cancer et quelques deuils successifs ce qui pensait-il lui donnait toute la légitimité pour me donner des leçons de conduite, moi qui « finalement n’avait jamais connu le moindre début de tragédie concrète » . Le caractère décousu et faussement héroïque de ses conseils m’avait juste exaspéré au dernier degré et j’avais fini par lui cracher au visage un glaviot dont il ne comprit sans doute jamais le sens. Je haïssais les invitations à graviter à la surface des choses pour assurer son petit bonheur aux allures de jardinet à la française, avec tout bien rangé dedans. Les mois s’enfilaient les uns les autres comme des chiens hagards et je n’étais sûr que d’une chose : je me manquais.



Une métaphysique de l’agonie devrait montrer que la fin de chaque existence symbolise la fin de l’existence en général et que, dans son combat contre la mort, l’impérialisme de la vie verra son élan irrémédiablement brisé.
Cioran
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Je prenais enfin congé de mes dernières nostalgies entre 30 et 33. Tout le système de compensation névrotique que j’avais échafaudé se révélait avarié. Les CV envoyés aux afférés me revenaient en mémoire comme autant de reculades devant le seul saut à accomplir. Je n’avais pourtant aucune velléité suicidaire sérieuse autant par lâcheté que par curiosité. Curiosité de voir des parcelles du monde sombrer avec moi. Je ne pouvais concevoir de plonger seul, il me fallait entraîner des camarades d’infortune hormonale, jouer à l’effrayeur d’aéroport, au briseur chaotique de finitude. Me fallait aussi cultiver encore l’arrière goût pour les hécatombes. Et puis CA s’est installé. CA a fait le vide. CA a tissé l’obsession du geste, des affairés, et du conseil municipal. CA venait des profondeurs du cerveau reptilien, CA voulait renverser l’ordonnancement naturel car CA se situait dans un espace mental proprement contre-nature. Rien ne pouvait le qualifier, c’était sans cause, sans propriétés ni finalités. Mais c’était bien là, à l’œuvre en moi.







Un tel nihilisme implique le contraire d’une identification avec le néant. Comme pour les gnostiques, le monde créé est (…) radicalement mauvais et sa négation est la possibilité d’un autre qui n’est pas encore. Tant que le monde reste ce qu’il est, toutes les images de réconciliation, de paix et de repos ressemblent à celles de la mort. La plus petite différence entre le néant et ce qui est parvenu au repos serait le refuge de l’espoir, no man’s land entre les bornes-frontière de l’être et du néant. C’est à cette zone que la conscience, et non le dépassement, devrait arracher ce sur quoi l’alternative n’a aucun pouvoir. Nihilistes sont ceux qui opposent au nihilisme leurs positivités de plus en plus délavées et qui par elles se conjurent avec toute la bassesse établie et finalement avec le principe de destruction. La pensée met son honneur à défendre ce qui est dénigré sous le terme de nihilisme.
Adorno
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Les pensées peuplées de fureur et défigurées par l’orgueil des malades, je refusais désormais en bloc que l’on me dise ce que je devais penser ou ne pas penser (des lois staliniennes balisaient précisément le champ de la pensée autorisée, même le mensonge était strictement interdit, comble sidéral de la crétinerie tyrannique et légale !), manger ou ne pas manger (pour le bien de ma santé évidemment), comment m’habiller, sortir, danser, délirer, s’éclater, communiquer, voyager, consommer, économiser, ressentir (lesgroupes psychologiques essaimaient sans cesse tels des étrons canins sur les trottoirs parischiens afin de guider les cobayes vers « le bon feeling « . Refus du magma informe à base de films-livres-journaux-tv-radios rapides, refus de « faire avec « en « jouant petit bras « , refus de finir converti comme tous ces romantiques révolutionnaires d’autrefois en garde chiourme du complexe militaro industriel à géométrie variable qui gouvernait tout l’occident. Le refus de théoriser, analyser ou réformer ce nœud gordien était une mission de salubrité publique que personne n’osait entamer. L’on préférait jouer dans la cour des inquisiteurs, des résistants du dimanche, des apôtres d’une tolérance plus que jamais hypothétique, des réformateurs de pacotille qui rasent l’espoir gratis. Il fallait un tapis de bombes sur l’ignoble et non des accointances sceptiques. Le marché soutenu par Le Léviathan opérait une destruction de masse des individus souverains, une destruction invisible et non sanglante, donc d’autant plus pernicieuse, une destruction spirituelle. J’avais fait sauter la frontière hémorragique qui séparait les hommes de leur liberté primale, séparation entretenue par la peur uniquement.