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Thursday, March 30, 2006

C’est en faisant que l’on sait que l’on fait ce que l’on fait et pourquoi on le fait.
Paul Ricoeur.


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C’était un mois de novembre ensoleillé. Me suis levé à l’aube. Traversé la zone pavillonnaire à pas obliques. Ma licence de tir sportif était caduque mais j’étais ami avec l’armurier. Le 357 magnum me tentait bien. Il y avait des promos, autant en profiter. Le tout était de finir en un beau feu d’artifice. Le crépitement des impacts, la beauté rutilante des canons, l’anonymat du club de tir, tout cela contribuait à un semblant d’existence funambule. Cette existence qui me fuyait et dont je savais qu’ils voulaient me priver. Eux les afférés. Je ressortais de mes séances de tir d’entraînement les paumes contractées, les nerfs rassasiés d’adrénaline. Le retour au studio miteux de 15 mètres carrés que j’occupais sans même l’aide au logement faisait monter le fiel en moi. Révulsé par le précaire, je partais dans un valium jusqu’au lendemain. La toile de l’évitement social enserrait mes journées jusqu’à l’asphyxie. Je n’étais plus qu’une chose bafouillante face aux caissiers de supermarché, ombre portée devant les usagers des transports en commun, le corps encombré par la sensation d’absurdité personnelle face au fonctionnement légitime, nécessaire et au total apparemment parfaitement normal de toute forme d’extériorité. Les autres semblaient au beau fixe. J’étais quant à moi juste totalement transi d’absence.
Lové dans une désolation tamisée, je pensais à ce geste fatal qui m’extrairait de ces jours discordants.

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